Niger : certaines lois de la république sont bafouillées

Article : Niger : certaines  lois de la république sont bafouillées
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28 juillet 2016

Niger : certaines lois de la république sont bafouillées

Le Niger se dote des lois mais qui ne sont presque jamais exécutées et/ou ignorées par le citoyen. C’est au moment de l’infraction qu’on te notifie l’existence d’une telle disposition juridique. Voici  deux lois votées, et promulguées par l’Etat nigérien et qui ne sont jamais ni exécutées ni respectées : la loi anti tabac et la loi contre les déchets plastiques.

Les étapes d’élaboration de la loi au Niger

Mais avant, nous devons apprendre à faire la différence entre ces concepts juridiques qui prêtent parfois à confusion dans ce  petit rappel.

En matière juridique, Il y a deux types  de textes hiérarchisés comme suit :

  • les textes législatifs qui sont entre autres :

La constitution : c’est la loi fondamentale qui détermine le régime politique, l’organisation des pouvoirs publics et la forme du gouvernement. Elle est adoptée au suffrage universel par voie référendaire.

Exemple de constitution : Constitution de la VIIéme République, promulguée par décret N°2010-754/PCSRD du 25 Novembre 2010 (JORN n° spécial 19 du 29 novembre 2010)

La loi : c’est une prescription en fonction de la constitution applicable à tous dans le principe de l’égalité devant la loi. C’est le gouvernement qui établit les projets de la loi qu’il soumet à l’assemblée Nationale.

Exemple de loi : loi N°98-12 du 1er juin 1998, portant orientation du système éducatif nigérien.

Et l’ordonnance : c’est un acte émanant du pouvoir exécutif. Elle a la même  la portée juridique que la loi;

Exemple d’ordonnance : N°93-31 du 3à mars 1993, portant sur la communication audiovisuel.

  • les textes réglementaires sont quand à eux composés de :

Le décret : C’est un acte à portée réglementaire normalement utilisé par le gouvernement pour exercer son pouvoir exécutif. Au Niger, les décrets émanent du Chef de l’Etat qui est le la seule autorité compétente en la matière. Ils sont de deux sortes. Les décrets pris en conseils de Ministre et ceux pris en dehors.

Exemple de décret : Décret N°99-396/PCR/MEN du 23 septembre 199, fixant les frais d »’inscription dans le cadre de l’organisation des concours et des examens scolaires, techniques et professionnels.

L’Arrêté : est un acte administratif pris en exécution d’une loi ou d’un décret.

Exemple d’Arrêté : Arrêté N°008/MEB/SG du 6 février, portant création des DREB et fixant les attributions des Directeurs Régionaux de l’Education de base.

 La Décision : elle est prise en exécution (ou en application) d’un décret ou arrêté. Elle peut aussi avoir une portée réglementaire ou individuelle. Elle est prise par les autorités administratives ou déconcentrées auxquelles elles ont expressément délégué leur pouvoir de décision et de signature concernant des matières ou domaines bien définie.

Exemple de décision : Décision N°009/P/CSC du 02 octobre 2013, portant approbation du Règlement intérieur du Conseil de Presse.

La Circulaire : c’est un acte pris au niveau des ministères en application d’un arrêté ou d’une décision émanant du Ministre. La circulaire interprète les textes réglementaires.

Exemple de Circulaire : Circulaire N°081/MEN/SG du 15 septembre 1980, relative aux correspondances administratives.

La Note de service : c’est document de communication interne. C’est un acte administratif inférieur à la circulaire que peuvent prendre les responsables des services.

Exemple de note de services : Note de service N°199/DECB 1 su 20 décembre 2000, portant restructuration de la direction de l’Enseignement de Base 1.

C’est à l’initiative du gouvernement qu’une une proposition de loi sous forme de projet de loi est fait et déposée au parlement. Le projet ou la proposition de loi passe en suite en examen puis au vote. Il appartient avant, aux commissions compétentes de passer à son examen. A ce niveau, le texte déposé peut être adopté, amendé ou rejeter carrément.

Le texte adopté par la commission est ensuite inscrit à l’ordre du jour de l’assemblée où il a été déposé. Il est alors discuté dans l’hémicycle, en séance publique : il peut être là encore être modifié par des amendements.

La loi votée est enfin promulguée par le Président de la République dans les 15 jours. Pendant ce délai, le Président peut demander un nouvel examen du texte et le Conseil constitutionnel peut être saisi pour vérifier que le texte de loi est conforme à la Constitution.

La loi promulguée entre en vigueur après sa publication au Journal officielC’est à ce niveau que tout se perd. Puisque, 80% de la population nigérienne sont analphabètes et vivent dans les zones rurales. Ils ne savent ni lire ni écrire. Comment alors, seront-ils informés du contenu de ce fameux journal officiel ? En plus, les débats et les votes des lois à l’hémicycle  ne suscitent aucun engouement chez cette frange de la population. Après les législatives, personne ne s’intéresse à ce qui se passe dans les locaux de  l’Assemblée si ce n’est pour une motion de censure. En ce moment, les uns et les autres restent câblés à leurs radios ou leurs postes téléviseurs. Des décrets d’application permettent sa mise en œuvre.

La loi anti tabac

En matière de lutte anti tabac, le Niger fait figure d’un bon élève. En cela, il a été successivement récompensé par le trophée OMS en 2002 à travers le Bureau de l’OMS, et en 2003 par l’Observatoire du Tabac en Afrique Francophone (OTAF). La loi a été votée à l’unanimité, le 30 Mars 2006 par l’Assemblée de l’époque. En effet, le projet a été soumis par le Ministère de la santé publique et de la lutte contre les endémies. Il vient renforcer la convention cadre de l’OMS pour la lutte anti tabac que le Niger a signé le 2 février 2005 et ratifié le 25 août de la même année. Cela dit, la loi anti tabac du Niger s’article autour des points suivants :

  • Interdiction de toute forme de publicité directe ou indirecte en faveur d’un produit de tabac.
  • Interdiction de toute opération de parrainage ou de sponsoring en faveur d’un produit du tabac.

Ont peut dire que, ces deux premiers points sont respectés à la lettre et ne souffrent d’aucun manquement.

  • Interdiction de la vente au détail.
  • Interdiction de fumer dans les lieux publics.

Ces deux derniers points ne sont aucunement respectés. En effet la vente sous toutes ses formes continue dans le pays. Les fumeurs quant à eux, n’ont aucun gène à allumer leur mégot, pourvue que l’envie leur remonte au crâne. Vous serez étonné, le jour où vous empruntez un véhicule de transport en commun avec un chauffeur fumeur. La fois dernière un boucher nous a coupé la viande le couteau d’une main et la cigarette de l’autre. C’est après avoir vidé le plat qu’on remarqua de la cendre de sa cigarette au fond.

Au marché, c’est la même chose. Quand tu discutes du prix de quelques choses, le commerçant fumeur allume sa cigarette. On dirait qu’il cherche une inspiration pour te vendre cher l’article. Le client est roi ailleurs, mais pas au Niger.

De la façon que les firmes productrices du tabac sont puissantes et têtues, c’est de cette manière que, les consommateurs nigériens défient la loi anti tabac. Surtout, depuis son adoption, aucune sanction exemplaire n’a été affligée à aucun contrevenant. Aussi, le pouvoir renforcé des organisations civiles qui ont la possibilité d’attaquer en justice les firmes du tabac quand elles violent les différentes dispositions juridiques par cette même loi ne se fait pas sentir.

La loi sur les déchets plastiques

D’un manquement à un autre, de l’incivisme à l’ignorance, la loi contre les déchets plastiques est entrain de subir le même sort que celle sur le tabac. Le mardi 28 octobre 2014, en plénière, les législateurs nigériens ont adopté à l’unanimité toujours le projet de loi portant interdiction, de la production, de l’importation, de la commercialisation, de l’utilisation et du stockage des sachets et des emballages en plastique souple à basse densité. Pourtant le plastique est présent partout au Niger (dans les maisons, sur les arbres, dans les routes, dans les services, etc…) et a envahit notre quotidien. Il est devenu une épreuve pénible qui asphyxie sans cesse l’environnement tant dans les villages que dans les centres urbains. A Tahoua, où les arbres prédominants sont des épineux, il s’accroche aux branchages. Les animaux qui en mangent finiront à l’abattoir.

Par cette adoption, on remarque aisément que le Niger a contribué seulement à gonfler la liste des pays africains qui ont déjà banni dans leurs habitudes les sachets plastiques non biodégradables. Car, rien ne démontre qu’aujourd’hui cette loi est respectée ou sera respectée par les commerçants producteurs et/ou importateurs du plastique. Chez le tablier, tout est emballé dans les sacs en plastique. C’est même le client qui le réclame si on ne le lui fait pas même pour le sucre de 25 F CFA. Chez le boucher, le boulanger, toute la marchandise est confinée dans du plastique. Avec la multiplication des points de vente d’eau en sachet communément appelée « piya wata » (ou pure water), l’ampleur est très grand.

Je finirai ce billet en ajoutant une touche humoristique. Le  Niger est un pays tropical où il fait chaud, très chaud et c’est connu de tous. Ne pensez-vous pas que cette chaleur ardente et impitoyable pourrait contribuer à la destruction facile des déchets plastiques ? C’est juste une hypothèse ! Si tu te sens concerné, tu peux financer la recherche. Pourquoi pas ?

 

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