ASSOUMANE Habibou

Le faux Saint

Malam Rogazo est un célèbre marabout, connu dans son village et les environnants. Il se fait passer pour un pieux, un saint, un élu de Dieu. Plusieurs années durant, il a pu garder ce statut, pour trois raisons…. Une histoire vraie dont les noms et les lieux ont été modifiés afin de garder l’anonymat.

Dans la vie, il y a ceux qui savent bien mettre en application les règles de fonctionnement social. Il y a aussi ceux-là qui les manipulent avec une précision chirurgicale à des fins personnelles. C’est le cas de notre faux saint, Malam Rogazo.

Il vole comme un oiseau

La fraternité, la cohésion sociale et l’entraide existent toujours dans les campagnes au Niger. Pour cela, quand vous empruntez une route villageoise il n’est pas étonnant de rencontrer des groupes d’hommes, de femmes ou des goupes mixtes qui se rendent dans un village simplement porter leur soutient, leur compassion à un parent ou une connaissance. Lors des visites dans les villages voisins, la présentation des condoléances ou toute autre cérémonie, notre faux saint ne suit pas le groupe. Malam Rogazo ne figure jamais dans ce genre de cortège. Il leurs donne une avance. Car, dit_il, il est  plus rapide qu’eux. En effet, il ne marche pas comme eux. Il peut voler d’un point A à un point B. Pour cette raison, tout le monde l’appelle « waliyi », c’est un niveau,  un degré de foi et de connaissance chez les musulmans que peu atteignent. C’est pourquoi il peut proposer aux autres de partir avant lui.  Mais malgré leur longue avance, il sera le premier à arriver.

Il résiste à la faim

Son anorexie fait parler de lui partout où il passe. En bon parleur, c’est lui-même qui parle de ses exploits à qui veut l’entendre. Quand il rend visite à ses proches, il les empêche « de gaspiller » leur nourriture pour lui. Il ne mange pas les mets des humains – lui qui est nourri par Dieu- . Personne ne l’a vu manger pendant tous ses déplacements.

Un guérisseur hors pair

Malam est un grand guérisseur. Sans démagogie, ses clients sont satisfaits de ses services. Et cela a fait une bonne publicité pour ses affaires. Sa puissance et ses techniques médicinales ont fait écho. Il est sollicité dans toutes les villes. En cela, il ne passe pas une semaine chez lui. Ses traitements sont très simples, faits à base d’une eau qu’il qualifie de magique et de boules de pattes céréalières.

Toute chose a une fin

L’homme a réussi a percer le mystère de la nature, à la dompter à sa guise. Ce n’est pas son semblable qui continuerait éternellement à le duper.

En vérité, Malam Rogazo n’a rien de pieux, ni de religieux. Selon des sources dignes de foi, c’est un grand ignorant qui sait exploiter les situations qui se présentent à lui. Le seul lien qu’il a avec des marabouts c’est uniquement sa tenue, son turban. Les savants marabouts de sa classe font des prêches ou entretiennent des disciples. De tout ça, il n’a rien. Il n’a même pas été à l’école coranique nous confie un sage du village. J’ai cru qu’il était gagné par la jalousie. Mais, il nous a défié en nous demandant de citer le nom d’un de ses marabouts chez qui il a étudié au moins une semaine. Il n’a aucunement appris le coran ici ou ailleurs. Notre interlocuteur n’est pas à négliger. Si on insiste, il peut nous dévoiler gratuitement ce faux mystère. Et pour faire parler un vieux au village, il suffit de lui payer des grosses noix de cola. Je sais à quoi vous pensez. Rassurez-vous ce n’est pas lui graisser les pattes. Il continue en disant : il prétend se déplacer dans les airs pour ses voyages,  mais en vérité, quand les autres prennent la route, lui il contourne par un autre chemin en courant, c’est possible vu la proximité des villages dans les zones rurales. Il a été aperçu plusieurs fois en train de courir dans les champs. Beaucoup de témoins oculaires ont confirmé cela. C’était un grand coureur à son jeune âge, quand il suivait les animaux aux pâturages. Jamais un berger ne l’a dépassé lors d’une compétition de course.

Rogazo est un être comme les autres. Il a la même envie de manger comme tout le monde. C’est seulement un grand menteur, qui se cache derrière la religion pour escroquer les autres. Pendant ses déplacements il a réussi à duper tout le monde grâce à son outre. C’est un outil prisé des nigériens pour la conservation de l’eau dans les zones rurales. Rogazo lui s’en servait autrement. En lieu et place d’eau, il la remplissait de bouilli ou de foura. S’il a des visiteurs, et qu’il a envie de manger, il rentre dans la chambre et rempli sa bouilloire. Il rentre dans les toilettes et fini son repas. Il revient s’asseoir comme s’il était parti faire ses besoins.

A chaque point, il trace un trait sur le sol comme s’il était entrain de compter le nombre de mesquineries de Rogazo. Avant de dessiner le dernier trait, il englouti la dernière moitié de sa cola et continue en ces mots. C’est vrai qu’il n’utilise pas les versets coraniques comme ses collègues pour soigner ses patients (es). Quand un malade lui fait part de ses problèmes, il lui demande de revenir demain. Il part expliquer le même problème au pharmacien qui lui fait une prescription. A la maison, il dissout les médicaments dans l’eau accompagnée d’arômes et de colorants qui dissimulent leur goût ou encore, il les enrobe dans de la patte et les fait avaler. Pour finir, le vieux affirme, hey mes petits fils, « peut-on se cacher pour une personne qui est déjà cachée ? » Certes, il vient d’évoquer un point de vue, un  sujet qui n’engage que lui.
Pour ma part, je vous dis que : Ce qu’un vieux sage a aperçu en étant assis, un enfant ne pouvait pas le voir même sur une colline. Parole de sages !

 


Niger : les commerçants contestent la concession des magasins sous douanes

Le groupe Bolloré Africa Logistic est une grande multinationale qui fait parler d’elle. Sa présence dans les pays africains est diversement appréciée, on voit en elle une autre forme de colonialisme qui ne dit pas son nom.

Au Niger, depuis maintenant plusieurs semaines, les syndicats des commerçants et une partie de la société civile crient au voleur et à l’arnaque suite à la concession des magasins sous douanes par les autorités de Niamey. En guise de contestation, les syndicats des importateurs et grossistes ont appelé les membres de leurs structures à observer un mot d’ordre dit de « fermeture de marché » ce lundi 8 Août 2016. Mais pour l’Etat nigérien, l’objectif visé à travers cet acte n’est ni plus ni moins rentabilisation et d’augmentation des recettes douanières. Au moment où le Niger a beaucoup plus besoin de ressources financières (pour faire face à l’insécurité frontalière et autres charges régaliennes), ces recettes s’avèrent indispensables.

Les commerçants nigériens – ce n’est un secret pour personne – sont les pires ennemis de l’impôt et des taxes douanières ! Ils veulent gagner, augmenter leurs chiffres d’affaire, fructifier leur commerce sous la protection de l’Etat. Mais, ils ne veulent jamais faire rentrer ce dernier dans ses droits. Rares sont ceux qui déclarent honnêtement la quantité de leurs produits importés. Mêmes ceux qui le font modifient encore les factures qu’ils présentent à la douane. Les importateurs nigériens trichent. Dans leur grande majorité, leur gestion de la chose est toujours familiale et informelle. Il n’y a pas de système comptable. Parce qu’au Niger un commerçant à horreur qu’on connaisse son chiffre d’affaire. On peut dire que seuls les fonctionnaires de l’Etat  payent leur impôt. Eux-mêmes s’ils n’étaient pas coupés depuis la source, beaucoup partiront à la retraite avec des arriérés.

La décision du gouvernement de rétrocéder les magasins sous douanes à Bolloré n’a pas fait l’unanimité dans le pays. Certains, la qualifie de scandaleuse et d’inadmissible.

Le mot d’ordre de la grève lancé par les principaux syndicats de ces opérateurs économiques n’a pas eu l’écho escompté. Les marchés sont restés ouverts toute la journée à Tahoua. D’ailleurs beaucoup de commerçants ignorent l’existence d’un tel débrayage. Les vendeurs et les acheteurs étaient sortis comme d’habitude malgré les fortes pluies tombées ça et là dans la région.

Au Niger, tout comme dans la sous région, il y a actuellement un problème de trésorerie. Les fournisseurs nationaux ont tellement d’arriérés de payement… s’en est au point que désormais tout le monde fuit le marché de l’Etat. Les enseignants contractuels accusent deux à trois mois d’arriérés de pécules. Dans ces conditions, qui peut fermer son commerce pour plaire aux syndicats ?


Niger : la déchéance des coiffeurs traditionnels

Les vagues de la mondialisation ont touché presque tous les secteurs de la vie quotidienne au Niger. La modernisation a contribué à l’apparition de certain métiers et à la disparition d’autres. Elle a portée ainsi un coup dur au rôle du coiffeur, dans les villes et dans les campagnes du pays.

Avant les années 1990, tout le monde allait chez le coiffeur pour se couper les cheveux. D’abord parce que c’est lui qui effectue les circoncisions et les scarifications. Il est aussi un guérisseur inégalé.  C’est un métier exclusivement transmissible, car seuls les initiés redoutables peuvent le pratiquer aisément et se glorifier. C’est un travail d’homme et un travail magique ! Il est très rare, sinon impossible, d’être coiffeur si les grands parents et les parents ne l’ont pas été. C’est une fonction où les brebis galeuses n’ont pas leur place. Il faut avoir des pouvoirs mystiques et surnaturels pour s’affirmer dans un groupe de coiffeurs traditionnels. Ainsi, dans les zones rurales, on peut faire 5 à 10 villages sans trouver un. Actuellement, il n’y a aucun coiffeur dans notre chef lieu de commune, Tajaé.

Nombreux sont les collègues désobéissants et les clients zélés qui ont payé cher leur insolence vis-à-vis du coiffeur. Lors des cérémonies traditionnelles dans les villages, la récompense du  coiffeur est connue de tous et gardée même à son absence. Gare à la famille qui se met au travers de son chemin: un enfant de notre village est devenu chauve, parce qu’il n’a pas été coiffé par le coiffeur de la famille lors de son premier rasage.

Une seule lame bien taillée suffit pour coiffer ou circoncire tous les enfants du village à un prix dérisoire. Cependant, les sensibilisations sur le SIDA et les infections sexuellement transmissibles (IST), ont confirmé l’implication et le rôle de ces outils dans la propagation de la maladie. Le coiffeur traditionnel a commencé à faire peur. Les parents préfèrent désormais circoncire leurs enfants dès la naissance dans les centres de soins. Certains (surtout les femmes) rasent d’eux-mêmes leurs enfants. Il y a plus de chance de se faire couper chez un coiffeur traditionnel.  Pour éviter de tomber sur un couteau infecté, au mauvais moment et au mauvais endroit, les clients devenus trop exigeants s’abstiennent d’aller chez lui, malgré ses lames à usage unique. Pour palier à ce problème, de nombreux salon coiffures ont vu le jour. Ces derniers proposent des services nettement meilleurs. Le client est entretenu, choyé et rasé dans des conditions d’hygiène correctes, à l’abri de tout soupçon. Dans la ville de Tahoua, la concentration des ces coiffeurs modernes est très visible. Ils sont présents devant les marchés, les écoles, sur toutes les rues, les gares, etc. Aujourd’hui et demain encore, la précarité de l’emploi continue sans cesse à pousser bon nombre de jeunes Nigériens à migrer vers des sous métiers. La renaissance acte II a du pain sur la planche.


Niger : certaines lois de la république sont bafouillées

Le Niger se dote des lois mais qui ne sont presque jamais exécutées et/ou ignorées par le citoyen. C’est au moment de l’infraction qu’on te notifie l’existence d’une telle disposition juridique. Voici  deux lois votées, et promulguées par l’Etat nigérien et qui ne sont jamais ni exécutées ni respectées : la loi anti tabac et la loi contre les déchets plastiques.

Les étapes d’élaboration de la loi au Niger

Mais avant, nous devons apprendre à faire la différence entre ces concepts juridiques qui prêtent parfois à confusion dans ce  petit rappel.

En matière juridique, Il y a deux types  de textes hiérarchisés comme suit :

  • les textes législatifs qui sont entre autres :

La constitution : c’est la loi fondamentale qui détermine le régime politique, l’organisation des pouvoirs publics et la forme du gouvernement. Elle est adoptée au suffrage universel par voie référendaire.

Exemple de constitution : Constitution de la VIIéme République, promulguée par décret N°2010-754/PCSRD du 25 Novembre 2010 (JORN n° spécial 19 du 29 novembre 2010)

La loi : c’est une prescription en fonction de la constitution applicable à tous dans le principe de l’égalité devant la loi. C’est le gouvernement qui établit les projets de la loi qu’il soumet à l’assemblée Nationale.

Exemple de loi : loi N°98-12 du 1er juin 1998, portant orientation du système éducatif nigérien.

Et l’ordonnance : c’est un acte émanant du pouvoir exécutif. Elle a la même  la portée juridique que la loi;

Exemple d’ordonnance : N°93-31 du 3à mars 1993, portant sur la communication audiovisuel.

  • les textes réglementaires sont quand à eux composés de :

Le décret : C’est un acte à portée réglementaire normalement utilisé par le gouvernement pour exercer son pouvoir exécutif. Au Niger, les décrets émanent du Chef de l’Etat qui est le la seule autorité compétente en la matière. Ils sont de deux sortes. Les décrets pris en conseils de Ministre et ceux pris en dehors.

Exemple de décret : Décret N°99-396/PCR/MEN du 23 septembre 199, fixant les frais d »’inscription dans le cadre de l’organisation des concours et des examens scolaires, techniques et professionnels.

L’Arrêté : est un acte administratif pris en exécution d’une loi ou d’un décret.

Exemple d’Arrêté : Arrêté N°008/MEB/SG du 6 février, portant création des DREB et fixant les attributions des Directeurs Régionaux de l’Education de base.

 La Décision : elle est prise en exécution (ou en application) d’un décret ou arrêté. Elle peut aussi avoir une portée réglementaire ou individuelle. Elle est prise par les autorités administratives ou déconcentrées auxquelles elles ont expressément délégué leur pouvoir de décision et de signature concernant des matières ou domaines bien définie.

Exemple de décision : Décision N°009/P/CSC du 02 octobre 2013, portant approbation du Règlement intérieur du Conseil de Presse.

La Circulaire : c’est un acte pris au niveau des ministères en application d’un arrêté ou d’une décision émanant du Ministre. La circulaire interprète les textes réglementaires.

Exemple de Circulaire : Circulaire N°081/MEN/SG du 15 septembre 1980, relative aux correspondances administratives.

La Note de service : c’est document de communication interne. C’est un acte administratif inférieur à la circulaire que peuvent prendre les responsables des services.

Exemple de note de services : Note de service N°199/DECB 1 su 20 décembre 2000, portant restructuration de la direction de l’Enseignement de Base 1.

C’est à l’initiative du gouvernement qu’une une proposition de loi sous forme de projet de loi est fait et déposée au parlement. Le projet ou la proposition de loi passe en suite en examen puis au vote. Il appartient avant, aux commissions compétentes de passer à son examen. A ce niveau, le texte déposé peut être adopté, amendé ou rejeter carrément.

Le texte adopté par la commission est ensuite inscrit à l’ordre du jour de l’assemblée où il a été déposé. Il est alors discuté dans l’hémicycle, en séance publique : il peut être là encore être modifié par des amendements.

La loi votée est enfin promulguée par le Président de la République dans les 15 jours. Pendant ce délai, le Président peut demander un nouvel examen du texte et le Conseil constitutionnel peut être saisi pour vérifier que le texte de loi est conforme à la Constitution.

La loi promulguée entre en vigueur après sa publication au Journal officielC’est à ce niveau que tout se perd. Puisque, 80% de la population nigérienne sont analphabètes et vivent dans les zones rurales. Ils ne savent ni lire ni écrire. Comment alors, seront-ils informés du contenu de ce fameux journal officiel ? En plus, les débats et les votes des lois à l’hémicycle  ne suscitent aucun engouement chez cette frange de la population. Après les législatives, personne ne s’intéresse à ce qui se passe dans les locaux de  l’Assemblée si ce n’est pour une motion de censure. En ce moment, les uns et les autres restent câblés à leurs radios ou leurs postes téléviseurs. Des décrets d’application permettent sa mise en œuvre.

La loi anti tabac

En matière de lutte anti tabac, le Niger fait figure d’un bon élève. En cela, il a été successivement récompensé par le trophée OMS en 2002 à travers le Bureau de l’OMS, et en 2003 par l’Observatoire du Tabac en Afrique Francophone (OTAF). La loi a été votée à l’unanimité, le 30 Mars 2006 par l’Assemblée de l’époque. En effet, le projet a été soumis par le Ministère de la santé publique et de la lutte contre les endémies. Il vient renforcer la convention cadre de l’OMS pour la lutte anti tabac que le Niger a signé le 2 février 2005 et ratifié le 25 août de la même année. Cela dit, la loi anti tabac du Niger s’article autour des points suivants :

  • Interdiction de toute forme de publicité directe ou indirecte en faveur d’un produit de tabac.
  • Interdiction de toute opération de parrainage ou de sponsoring en faveur d’un produit du tabac.

Ont peut dire que, ces deux premiers points sont respectés à la lettre et ne souffrent d’aucun manquement.

  • Interdiction de la vente au détail.
  • Interdiction de fumer dans les lieux publics.

Ces deux derniers points ne sont aucunement respectés. En effet la vente sous toutes ses formes continue dans le pays. Les fumeurs quant à eux, n’ont aucun gène à allumer leur mégot, pourvue que l’envie leur remonte au crâne. Vous serez étonné, le jour où vous empruntez un véhicule de transport en commun avec un chauffeur fumeur. La fois dernière un boucher nous a coupé la viande le couteau d’une main et la cigarette de l’autre. C’est après avoir vidé le plat qu’on remarqua de la cendre de sa cigarette au fond.

Au marché, c’est la même chose. Quand tu discutes du prix de quelques choses, le commerçant fumeur allume sa cigarette. On dirait qu’il cherche une inspiration pour te vendre cher l’article. Le client est roi ailleurs, mais pas au Niger.

De la façon que les firmes productrices du tabac sont puissantes et têtues, c’est de cette manière que, les consommateurs nigériens défient la loi anti tabac. Surtout, depuis son adoption, aucune sanction exemplaire n’a été affligée à aucun contrevenant. Aussi, le pouvoir renforcé des organisations civiles qui ont la possibilité d’attaquer en justice les firmes du tabac quand elles violent les différentes dispositions juridiques par cette même loi ne se fait pas sentir.

La loi sur les déchets plastiques

D’un manquement à un autre, de l’incivisme à l’ignorance, la loi contre les déchets plastiques est entrain de subir le même sort que celle sur le tabac. Le mardi 28 octobre 2014, en plénière, les législateurs nigériens ont adopté à l’unanimité toujours le projet de loi portant interdiction, de la production, de l’importation, de la commercialisation, de l’utilisation et du stockage des sachets et des emballages en plastique souple à basse densité. Pourtant le plastique est présent partout au Niger (dans les maisons, sur les arbres, dans les routes, dans les services, etc…) et a envahit notre quotidien. Il est devenu une épreuve pénible qui asphyxie sans cesse l’environnement tant dans les villages que dans les centres urbains. A Tahoua, où les arbres prédominants sont des épineux, il s’accroche aux branchages. Les animaux qui en mangent finiront à l’abattoir.

Par cette adoption, on remarque aisément que le Niger a contribué seulement à gonfler la liste des pays africains qui ont déjà banni dans leurs habitudes les sachets plastiques non biodégradables. Car, rien ne démontre qu’aujourd’hui cette loi est respectée ou sera respectée par les commerçants producteurs et/ou importateurs du plastique. Chez le tablier, tout est emballé dans les sacs en plastique. C’est même le client qui le réclame si on ne le lui fait pas même pour le sucre de 25 F CFA. Chez le boucher, le boulanger, toute la marchandise est confinée dans du plastique. Avec la multiplication des points de vente d’eau en sachet communément appelée « piya wata » (ou pure water), l’ampleur est très grand.

Je finirai ce billet en ajoutant une touche humoristique. Le  Niger est un pays tropical où il fait chaud, très chaud et c’est connu de tous. Ne pensez-vous pas que cette chaleur ardente et impitoyable pourrait contribuer à la destruction facile des déchets plastiques ? C’est juste une hypothèse ! Si tu te sens concerné, tu peux financer la recherche. Pourquoi pas ?

 


Existe t-il une politique de la ville à Tahoua ?

S’il y a un domaine ou un secteur où les mairies ont échoué au Niger, c’est celui de l’assainissement des centres urbains. Au Niger, les villes sont sales et les stationnements anarchiques continuent de freiner  la circulation malgré des budgets faramineux qui sont alloués pour leur embellissement.

Cela fait plusieurs années que les routes sont les mêmes dans la ville de Tahoua et la capitale de la région. Aucune route dans cette cité n’est meilleure qu’une autre. Essayez le tronçon qui se trouve derrière l’auto-gare du côté sud. C’est un réel parcours de combattant pour les usagers qui empruntent cette route. Cela fait des années et des années que ce tronçon est dans ce piteux état. Aujourd’hui, une partie est presque devenue un marigot après son curetage. Des usagers crient leur râle-bol, mais la municipalité n’a jusqu’à cette date rien entrepris pour désengorger cette voie. D’ailleurs ce chemin, nous a t-on dit, mène chez l’une des maisons du président du conseil de la ville. En cela, on ne peut pas dire qu’il ne soit au courant de rien ou qu’il ignore la situation. Ce dernier ne fait plus ses apparitions publiques habituelles, depuis sa cuisante défaite aux législatives de février dernier.

Ce sont des slogans plein d’espoir qui ont caractérisé les dernières campagnes électorales au Niger. Cependant, on comprend aisément à la fin des plébiscites, que nos politiciens (élus ou non élus) n’ont plus la même ardeur, le même courage et la même vivacité qu’avant. Ils ne se soucient guerre de leur électorat. Sachez une chose, le courage ne s’achète pas ni la matière grise. Et dans le monde politique nigérien, il y a toujours ceux qui sont à court des deux.

Une ville sans route n’est pas plus qu’un village. Vous vous rendrez compte vous-même que, dans les villages, les routes sont meilleures qu’ici. La situation devient plus préoccupante pendant la saison des pluies. Des précipitations, aussi faibles soient-elles, inondent les routes de Tahoua par manque de système de drainage.

La voie menant au gouvernorat est coupée par un grand et dangereux ravin juste après le mur du complexe scolaire privé Koulmané et divise la ville en deux. Les nids de poules, ou plutôt les nids d’autruches, empêchent et bloquent la circulation et endommagent les engins. Si la mairie ne travaille pas les routes, qui le fera à sa place ? Le but de la décentralisation est sans nul doute de  rapprocher l’administration des administrés ; mais au regard de ce qui se passe, on peut dire qu’on n’est pas encore prêt. Toutefois, je sais que parler de ces choses surtout dans la région natale du président de la République, vous fait gagner facilement le titre d’un insatiable militant et d’opposant. Tant pis pour tout ce que vous nous qualifierez !

Si dans la plupart des cas, c’est le réseau urbain qui est mis en cause, les quartiers comme Sabon Gari, Malala, sont complètement submergés en saison hivernale. L’eau des pluies tombée sur place à laquelle s’ajoute celle du ruissellement, envahissent les maisons et les espaces vides. Ce problème est né de l’attribution des parcelles dans cette ville. Les terrains vendus aux  populations ne sont pas viabilisés. En lieu et place de parcelles pour habitation, ce sont des champs culturaux qui sont vendus aux acquéreurs qui les mettront en valeur à leur manière engendrant des conséquences que nous sommes entrain de subir.

Un autre problème qui entrave la circulation est le stationnement anarchique des gros porteurs venant d’Algérie. Chaque début et fin du mois, ces camions envahissent la ville. Puisque la mairie n’a pas réservé des endroits pour leur stationnement comme dans d’autres grandes villes du pays, les chauffeurs n’en font qu’à leur tête. Ils peuvent se garer devant ta maison pourvu que cela leur permette de décharger leurs marchandises.

Les taxis moto, Kabu-kabu, très têtus dans la plupart des cas et arrogants contribuent aussi à rendre la circulation beaucoup plus compliquée. La seule Avenue, (si elle l’est vraiment et aussi la seule voie baptisée) de la ville est pratiquement impraticable le jour du marche même à pied. Il existe peu d’espaces réservés aux piétons : il n’y a aucun trottoir sur ce tronçon, à partir de la direction régionale des transports jusqu’à la pharmacie Lafiya. Ces espaces sont illégalement occupés par des boutiques de tout genre, tout comme les alentours des écoles et du centre hospitalier régional.

En l’absence d’une vraie politique de la ville, des animaux errants provoquent toujours des accidents, et détruisent les arbres dans les maisons.

Monsieur le Président de la communauté urbaine, messieurs les conseillers municipaux, en attendant le programme spécial de modernisation des villes du président de la République,  faites parler vos cœurs et votre bons sens. Tahoua, au stade actuel, mérite mieux.


Le baptême dans la société nigérienne

Après une semaine de naissance, une cérémonie est organisée pour donner un nom au nouveau né. C’est le baptême. Même si les avis sont partagés entre les religieux sur certaines étapes de ce rite, il n’est pas aussi organisé à tous les nouveaux nés. Bref, voilà en quoi se résume une cérémonie de baptême ou « zanen suna » au Niger.

 Le baptême est une Sunna fortement recommandé mais qui n’entre pas dans les actes obligatoires en islam. Au Niger, ce sont les enfants conçus dans le cadre du mariage qui sont baptisés. On les appelle les enfants légitimes. Un enfant né hors de cette union sacrée est appelé bâtard ou enfant illégitime. Même si le père le reconnait après, il ne bénéficie pas de tous les avantages qu’ont ses frères légitimes. C’est-à-dire, au il  ne peut jamais hérite son père à sa mort même s’il est le plus riche de la planète. Concevoir un enfant en dehors du mariage est une honte chez moi. Il n’apporte aucune joie, aucune gaité à la famille. Qui pourra lui  consacrer ces dépenses ostentatoires qui caractérisent une cérémonie de baptême ?

 La première naissance

Généralement la femme donne naissance après neuf mois de grossesse. Mais il peut y avoir de cas des naissances précoces pouvant intervenir pendant le septième 7ème ou huitième 8ème mois. La virilité ne suffit pas en Afrique pour être homme, il faut pouvoir faire des enfants. Une femme aussi acquiert le respect et l’admiration de sa belle femme quand elle peut donner naissance. Elle ne doit pas être « celle-là qui ne fait que  manger et aller le reverser dans le water » comme on le dit. Un enfant est une richesse. C’est aussi, un bonheur qui contribue à la solidification des couples.

Dans les villages nigériens, traditionnellement, la première fois quand une femme tombe enceinte, elle est conduite, quelques jours, voire quelques mois avant l’accouchement, chez ses parents où elle sera surveillée par sa mère ou sa tutrice.  Et lorsque l’accouchement surprend tout le monde et qu’il se fait  dans la famille conjugale. Elle est accompagnée dans ce déplacement de maternité par une dame de sa belle-famille, la femme est aussi ramenée chez sa famille d’origine. Elle est accompagnée par la maman du mari, ou sa tante.
Chez elle, on dit qu’elle est venue pour la maternité « ta zo ma aihi » et chez son conjoint on dit « ta tahi ma aihi » elles est partie pour la maternité. Ces propos sont similaires, même au cas où les conjoints sont du même village, la même ville, mais cette fois-ci entre familles.

La future mère restera auprès de ses parents où elle sera choyée et entretenue comme une reine. Car c’est un honneur que sa fille tombe en ceinte étant mariée. Au même moment, la famille du conjoint est  à l’écoute.

 Le jour de la naissance

 Aux premiers signes de l’accouchement, quand les parents n’ont eu le temps d’aller au centre de soin le plus proche, la matrone est informée immédiatement. Elle vient avec ses outils sans trop tarder. Au Niger, chaque village, chaque quartier a sa matrone ou « makarbiya ». C’est elle qui assiste l’accoucheuse. A l’arrivée du bébé, elle coupe le cordon ombilical et lui donne le premier vain. Aussi la matrone dans les villages joue le rôle d’agent d’état civil parce qu’elle dispose d’un cahier sur lequel sont enregistrés les noms, le sexe et le jour de la naissance des nouveaux nés.

 Les hommes n’ont pas accès à la chambre lorsque la femme est en travail contrairement à ce qu’on voit à la télé où le mari filmait l’accouchement. Le placenta avec le cordon ombilical sont enterrés dans la concession des grands parents maternels (dans le cas ou la maman à accouché chez ses parents) ou paternels. Dans le cas où l’accouchement a eu lieu au dispensaire, on les remet aux parents pur venir les enterrer à la maison. Cet acte très symbolique et confère au nouveau-né une identité permettant de jouir de tous les droits comme tout autre habitant de ladite localité. Il n’est pas étonnant d’entre des gens dire lors d’une dispute ou une causerie : que « nan anka busne cibiya ta »  autrement dit,  c’est ici qu’on a enterré son nombril ». Cela c’est  pour prouver à son interlocuteur son appartenance, à la zone, à la localité. L’accouchement terminé, la famille de la femme dépêche un messager pour annoncer la bonne nouvelle à celle du conjoint, qui consiste à dire le jour ; le sexe de l’enfant, et l’état de santé de la mère.

Comment est fixé le jour du baptême

Conformément à la tradition, le jour de l’accouchement détermine celui du baptême. C’est toujours une semaine après la naissance. Si le bébé est le mardi, donc le baptême sera célébré le mardi prochain. Mais attention : si l’enfant est né le lundi à 1 heure du matin, chez certains c’est toujours le lundi. Mais s’il est né la nuit du lundi après la prière de subuh, là on considère que le baptême c’est le mardi. On dit toujours le baptême c’est 7ème jour après l’accouchement, mais en principe c’est le 8e. Car un enfant né le vendredi par exemple, pour son baptême on n’aura : vendredi(1), samedi(2), dimanche(3), lundi(4), mardi(5), mercredi(6), jeudi(7) et vendredi(8).

La famille du père envoie ce qu’on appelle « azabar zahar ». Ce dernier est composé du mil, du savon, du pétrole (pour les lampes à pétrole quand il n y’a pas de lampes troches), du parfum et des habits. Il est important de souligner que dans la tradition nigérienne, avant l’attribution du nom au nouveau-né, il est formellement interdit de le laisser seul dans la maison par crainte qu’il soit échangé par les djinns. C’est pourquoi, chaque fois que la mère va aux toilettes, il faut un gardien pour le bébé en attendant qu’elle revienne. Personne ne prononcera son propre nom avant le baptême.  La mère ne prononce jamais le nom de son premier enfant. Aussi, elle ne manifeste pas publiquement son amour pour l’enfant. Cette pratique n’est-elle pas à la base du comportement attardé qu’on reproche au premier enfant (l’aîné) ?

Ainsi, dès la veille, la famille de la femme se prépare pour recevoir les deux délégations masculine et féminine du jeune père lorsqu’ils sont de villages ou de villes différentes: les parents hommes de la jeune mère et d’autres participants restent à l’entrée de la maison tandis que les femmes sont dans la concession. Ils vont préparer à manger de bonne heure pour la délégation masculine composée de l’Imam du village ou du quartier et d’autres personnes proches.  Cette délégation se rend tôt le matin transportant avec deux moutons bien gras (ceux qui ont des moyens, amènent un taureau), de la cola, et une somme d’argent qui permet de régler certaines dépenses coutumières telles que :

  • 1 000 Fcfa pour le chef du village « kudin mai gari» ;
  • 2 000 Fcfa pour les marabouts « kudin malamai» ;
  • 1 000 Fcfa pour le mai samari;
  • 1 000 Fcfa pour le kungiya mata ;
  • 1 000 Fcfa pour la matrone « kudin makarbiya» ;
  • 1 500 Fcfa pour celle qui prépare pour la jeune mère durant la première semaine de l’accouchement « kudin madakiya» ;
  • 1 000 Fcfa pour les barbiers-coiffeurs « wanzamai ou manzamai » ;
  • 1 000 Fcfa pour les grands parents du nouveau-né « kudin kakani» ;
  • 1 000 Fcfa pour les gaillards du village « kudin kata gari» ;
  • 1 000 Fcfa pour « l’association » des animateurs de la course des chevaux « kudin buntum» ;

Lorsque toutes ces demandes sont satisfaites, comme pour le cas du mariage, la distribution de la cola (plus les dattes parfois) suit, les Imams présents ce jours prononcent à tour de rôle la « fatiya » au cours de laquelle on attribuera un mon à l’enfant conformément à la tradition islamique. Ce nom est, soit tiré du Coran (à l’exception du nom de pharaon), soit proposé par les parents de l’enfant. Mais, ce nom ne sera attribué qu’après avoir égorgé l’un des moutons. C’est la raison pour laquelle, lorsqu’une personne a un surnom, on dit quel est le nom que lui avait attribué son mouton c’est-à-dire son nom du baptême.

Après la « fatiya« , la délégation des hommes ayant assisté aux cérémonies religieuses regagne le village, informe les femmes et autres personnes qui n’y ont pas assisté, du nom de l’enfant. Dans le cas où les conjoints sont du même village, c’est tous les marabouts et toute autre personne de sexe masculin et des vieilles femmes qui assistent à la cérémonie.

Aux environs de 13 heures, après les tâches domestiques, la délégation féminine composée des dames, amies de la femme et des jeunes femmes venues par le canal du mariage partageant la belle-famille avec la jeune mère appelées « matan samri », se rend à la cérémonie. Cette délégation porte avec elle les contributions faites par les proches et amies à la jeune mère.

Dans les environs de 15 heures à 16 heures, un crieur public, le griot, annonce le début d’une petite cérémonie appelée aski « raser la tête de l’enfant ». Le barbier-coiffeur « manzami » ou rase la tête de l’enfant en présence de ses tantes paternelles et maternelles, de ses grands-mères  et autres femmes proches. Ensuite, il procède aux diverses scarifications appelées salka « outre ». Cette coutume consiste à faire de petites cicatrices autour du nombril, sur le dos, sur les genoux, le front, les tempes et les articulations du nouveau-né. Selon la croyance locale, elles protègent l’enfant contre les troubles émotionnels, les stress. Il y a des cas où le  « manzami » coupe la luette de l’enfant ou « le frein à la langue », la petite membrane située au dessous de la langue qui pourrait gêner l’enfant à l’âge adulte. Pour une fille, il vérifie le sexe, s’il est bien formé. Dans le cas contraire, il retire les parties gênantes communément appelées « sarka » ou chaine. Il peut aussi faire la circoncision au petit garçon. Au cours de cette petite cérémonie, le flatteur (dan maba) chante les louanges des familles de deux côtés du nouveau-né. Aussi, circule-t-il de petits cadeaux pour le nouveau-né, qui sont empochés par les wanzamai. À la fin d’aski, les barbiers reçoivent une prime de 8 000 Fcfa, à raison de 4 000 Fcfa côté père et 4 000 Fcfa côté mère.

La délégation féminine passe toute la soirée dans la famille de la jeune mère, chantant  et dansant avec les femmes et les filles du village ou du quartier. Elle rentre tard le soir voire la nuit selon la distance, avec des morceaux de viande pour la belle-famille. Il y a aussi des cas où la jeune mère égorge un bouc (en plus des moutons de père) pour donner à celles et ceux qui lui ont porté leurs contributions et les « personnalités » de sa belle-famille et autres assistants de marque (père, mère, frères, sœurs, tantes, barbier-coiffeur, matrone, etc.) selon les règles coutumières.

La femme regagne son foyer après généralement, quarante jours, deux mois de maternité « bikki »selon les localités et les coutumes. Elle sera accompagnée lors de ce retour « triomphale », par une dame de son village d’origine transportant avec elles quelques kilos de riz et des condiments. Ce qui lui permet de faire sa première préparation après son retour. Cette préparation fait l’objet d’une distribution différente de celle que connaissent les préparations ordinaires. Car elle annonce le retour de la jeune mère.

En cas de seconde naissance

Pour la deuxième grossesse et toutes celles qui vont suivre, la femme ne revient pas chez elle à l’exception de  certaines ethnies comme les peulhs et les touaregs. On considère que la femme a acquis beaucoup d’expériences, surtout en ce qui concerne l’entretien des enfants. Elle  s’est familiarisée avec les membres de sa belle-famille. Et grâce à cet enfant, elle marque son territoire et devient un membre à part entière de la famille.


Les funérailles dans les villages Hausa

Selon le dictionnaire Larousse, les funérailles sont l’ensemble des cérémonies qui accompagnent un enterrement. Chez les Hausa, elles sont communément appelés « jana’izah ». Bien que son organisation dépende de ce qui a été recommandé par la religion islamique, il n’est pas exclu de rencontrer des dissimilitudes d’une région à une autre, d’un village à un autre, d’une ethnie à une autre. Voici à quoi ressemblent les funérailles dans les villages nigériens.

L’annonce du décès

Les Hausa en général, et particulièrement ceux du Niger, sont une ethnie fortement islamisée. Ainsi, ils pratiquent leur enterrement conformément à ce qui a été prescrit par la loi islamique.

Lorsqu’une personne décède, qu’elle soit homme ou femme, on la couche sur son côté droit, allongée sur la position nord-sud, sa tête vers le sud et le visage tourné vers l’Est, en direction de la Ka’abah (Maison sacrée de Dieu). Cette position est appelée kwancin Gawa. Ce sont parfois les cris et les pleurs des femmes et des petits enfants qui annoncent le décès dans les ménages. Subséquemment, dès qu’on entend ces pleurs, surtout s’il y a un malade dans la famille, on déduit que ce dernier a rendu l’âme. Lorsqu’il s’agit d’une mort subite, ces cris de détresse suscitent des interrogations et les sages du village convergent vers le lieu pour se renseigner. Aussitôt le décès confirmé, les préparatifs des funérailles commencent. Car, selon la religion musulmane, il est interdit de garder la dépouille mortelle pendant une longue période. On doit l’amener dans sa « dernière demeure » au plus vite. Surtout dans les zones rurales, où il n’existe pas de morgues comme dans les centres urbains. Qu’il soit une mort définitive ou un simple chauma, les villageois n’attendent pas. Ainsi, d’aucun pensent que certaines personnes sont enterrées vivantes au village.

Des messagers sont envoyés dans les villages environnants pour informer les parents proches. Aujourd’hui, avec l’avènement du cellulaire, des réseaux sociaux à portée de mains, les messagers sont délaissés. Dans le village, tout le monde masculin majeur se mobilise pour l’enterrement. Des petits enfants de moins de 15 ans assistent aux enterrements maintenant. Quand j’étais enfant, il y avait un grand respect pour les morts. Lors d’un décès dans notre village, on est confinés dans les chambres. Par peur, aucun enfant ne peut sortir dehors. Les femmes ne pileront pas le mil. Toute manifestation prévue ce jour dans le village est automatiquement suspendue ou reportée.

Toilette, habillage et creusage de la tombe

Dans un premier temps, une équipe composée des jeunes hommes se rend au cimetière, qui se trouve toujours à quelques mètres des habitations. Cette tombe est creusée en fonction de la toise (taille) du défunt. Sa largeur ne dépasse pas aussi 20cm. Sa profondeur n’atteint guère un mètre. Une deuxième équipe composée des personnes âgées et des proches du défunt, reste dans la famille. En ce qui concerne la purification de la personne morte (toilette et ablutions), lorsqu’il s’agit d’un homme, ce sont les hommes qui le nettoient et pour une femme, ce sont les femmes (généralement des vieilles dames) qui s’en chargent.

Une troisième lui fait la sutura (un terme arabe qui veut dire porter des habits, se couvrir) qui  consiste à :

  • Défaire les tresses (pour les femmes) ;
  • Faire la toilette au défunt ou à la défunte ;
  • Lui faire ses dernières ablutions ;
  • L’habiller ;
  • Le parfumer si possible ;
  • Et enfin l’habiller.

Mais, comment est confectionné l’habillement d’un mort selon le sexe ?

L’habillement d’un mort est aussi le reflet de sa tenue étant vivant. Lorsqu’il s’agit d’un homme :

On lui confectionne une petite chemise, un pantalon et un bonnet.

Pour la femme :

C’est  une robe, un pagne, un foulard et un voile.

La couture est faite à la main par les hommes à l’aide de fil blanc et d’une aiguille.

La prière des morts

La prière des morts ou sallah zana’iza vient en avant dernière position. Elle consiste à déplacer la dépouille devant une ou plusieurs rangées de fidèles hommes (composées de la première et de la troisième équipe) pour lui rendre le dernier hommage. C’est une prière très particulière qui se pratique dans la cour du défunt, en dehors mais jamais dans une mosquée (sauf dans un cas exceptionnel). Aussi, elle se pratique en station debout du début jusqu’à la fin : pas d’inclinaison, ou de prosternation. Dès qu’elle est finie, la dépouille est transportée au cimetière après la confirmation de la deuxième équipe que, la tombe est achevée. Le cortège funèbre se déplace dans un grand silence hormis quelques voix qui prononcent le takhbir « allahu akhbar » (Dieu est grand). Le port de la dépouille est fait à tour de rôle dans une sorte de cercueil (brancard, lit) conçu avec des branches de rônier « mankara ». Il est utilisé pour transporter toute personne jeune ou adulte morte, homme ou femme sauf les bébés. Il est ramené au village et gardé dans la mosquée à la fin de la séance. Il est aussi important de préciser que dans le cortège funèbre, la dépouille reste toujours derrière, ou au milieu, mais jamais devant le cortège.

Dernière étape du voyage céleste

Au cimetière, la dépouille est placée devant la tombe au côté ouest avant de bien arranger cette dernière. Aussitôt qu’elle a subi quelques retouches, la dépouille ensevelie dans un linceul est placée dans sa dernière demeure. Tous ceux qui sont présents prononcent le takhbir « allahu akhbar ». D’autres fondent en larmes. D’autres observent sans rien dire. Après avoir arrangé sa position dans la tombe, on la couvre avec du bois d’abord, puis de la paille fraîche (si c’est en saison pluvieuse) ou des branchages sur lesquels on fait passer du banco pétri. Après on procède au remblayage de la tombe jusqu’à une certaine hauteur. Toutefois, il faut rappeler que ce n’est pas tous les morts qui sont enterrés au cimetière public. Les chefs, les riches, et les grandes personnalités du village sont enterrés dans leurs concessions. Selon des rumeurs villageoises, ce traitement est fait pour éviter la profanation de leurs tombes par des sorciers qui amputent certaines parties de la dépouille à des fins mystiques.

Enfin, le cortège revient au village où se passe le « du’a » (invocations) pour la personne décédée. Dans certains localités où le du’a est fait au cimetière avant de regagner le village. Cette question de du’a pour les morts, divise les marabouts, les Uléma, tant dans les zones rurales qu’urbaines au Niger.

Les personnes qui sont sur le lieu présentent leurs condoléances aux parents du défunt ou de la défunte. Pendant trois jours successifs, un groupe de personnes restera chez le défunt pour recevoir les condoléances. Ce groupe se reconnait par le grand silence qui le caractérise. Mais aujourd’hui, c’est tout à fait le contraire. Ce  lieu est devenu une tribune de toutes les diatribes.

Le comportement de l’époux ou de l’épouse du défunt

Si c’est la femme qui a perdu son mari, elle observera un deuil, une période de veuvage (takaba ou ragga) de 130 jours (4 mois, 10 jours). Au cours de cette période, il lui est interdit de se marier, d’avoir des rapports sexuels et de porter des vêtements neufs. Elle doit porter un voile de couleur noir symbolisant le deuil. Elle n’utilise pas le parfum et toute autre chose pouvant la rendre séduisante. Par contre l’homme n’a pas des restrictions comme la femme. Il peut même se marier quelques jours après le deuil.

 


Niger : quand la femme rurale est contrariée

Les relations entre la femme et son mari ne sont pas toujours au beau fixe. Ainsi, les violences conjugales sont monnaie courante tant dans les zones urbaines qu’urbaines au Niger. Dans ces situations, c’est toujours la femme la perdante. Mais pour manifester son mécontentement, son désaccord et son insatisfaction, elle fait recourt à des méthodes très pacifiques.

A travers des paroles négatives et remplies de mauvaises choses, elle dit non à son époux incapable de prendre ses responsabilités. Lorsque la femme se sent chagrinée par le comportement indigne qu’elle a observé chez son mari, elle se soulage en faisant recours à son moyen de défoulement et d’interpellation. Parfois c’est quand elle pile ou prépare le repas. Elle devient le « Gandhi féminin ». Ne pouvant pas s’adresser face à face à son époux, elle balance son pilon en l’air, claque les mains et extériorise ses pensées. Ce sont des paroles pleines de sarcasmes sous forme de poèmes, de proverbes qui différent d’une situation à une autre. En voici quelques uns, d’une femme hausa.

Le mari qui ne part pas en exode

S’adressant à l’homme qui est toujours à la maison, qui ne part pas en exode, la femme dit : Tashi, dan karan rago, mazan kwarai suna Abuja matan su kuwanfule biyu biyu. ni ko dan dari ka aikomin . « Lève-toi ce paresseux, les vrais hommes sont à Abidjan, ils envoient à leurs femmes des habits par paires. Si tu peux m’envoyer même une pièce de 500 FCFA « .

Pour le mari incapable de nourrir son épouse

En ce qui concerne l’homme qui ne nourrit pas la femme, ne l’habille pas, elle dit : Dan karan badi  mika dada imba yaji ga fura : « cette poudre à quoi sers-tu si ce n’est pimenter le foura ». A travers ces mots, elle veut signifier à son homme qu’il est totalement absent dans la provision alimentaire et vestimentaire du ménage, qu’il n’a aucune importance au sein du foyer. Enfin, il n’assure pas les responsabilités qui lui incombent.

Elle continue en disant : Allah shiga cida kura gishiri, nama ko gidan wa a ta ci : « c’est Dieu qui nourrit l’hyène en sel, la viande n’importe où elle peut en trouver ». C’est-à-dire que, qu’il lui donne ou pas, elle trouvera par tous les moyens de quoi se nourrir. Elle ne mourra pas de faim. Kiyawan hatsin namiji daka, in ka ga  mai saye saisamai in ka ga dan bara aunamai : « Le mil d’un homme mérite d’être pilé, vendu à un acheteur et donné en aumône au mendiant ».

La femme fait tout cela en présence du mari ou de ses ami(e)s. Elle le taquine et lui envoie des paroles blessantes ; lui qui est toujours assis à la maison et ne peut rien lui donner à préparer aux enfants. Quand c’est elle qui a cherché de quoi assurer ne serait-ce que la ration quotidienne, elle doit le faire savoir de façon sarcastique à son cher époux mais en est incapable parce qu’en principe, c’est le mil du mari qu’elle doit piler mais, malheureusement, il reste absent sur ce plan. Cela dit, le manque est flagrant au point qu’on ne peut rien trouver à vendre ou pour faire des cadeaux.

S’il ne décide pas de changer, la femme aussi, ne s’arrêtera pas. Ainsi, la femme n’a d’adversaire que son mari. Elle ajoute et peut passer des jours à lui répéter la même chose : Icce mai kama ka bota,  ta kwawan kare sabo na, inji samrayin hawuwawwa : « c’est le morceau de bois formé qui fait une bonne partie en bois de la houe. Monter sur la tige (de mil, sorgho ou maïs) fait partie de l’habitude, a dit le jeune caméléon ». La femme veut souligner une fois de plus au mari son incapacité à faire face aux responsabilités qui lui reviennent. Elle veut dire qu’il n’est pas courageux, qu’il n’est pas un homme. C’est pourquoi, ils sont en train de vivre cette situation de précarité. Ainsi, elle réclame le divorce de façon implicite.

Quand le mari veut embrasser la polygamie

Malgré son caractère religieux, les femmes sont hostiles à la polygamie. Elles préfèrent vivre seules dans la pauvreté qu’être dans l’opulence avec une coépouse… Elle fait tout pour s’opposer et faire échouer le projet de son mari qui veut prendre une seconde épouse. Pour le mari qui, lui, prend une coépouse, elle dit : hannu mai kufan miya muka lasa, danyin ruwa mu shahe ga zane. Ou : Ina ruwan sa da kidi ko da shizan na yanka naina : « c’est la main trempée dans la sauce que nous léchons, celle trempée dans l’eau nous l’essuyons sur le pagne. Le taureau s’en moque du jeu de tam-tam même si c’est pour l’égorger ». La femme veut exprimer son insouciance face à la nouvelle situation. La femme veut signifier au mari qu’elle n’accorde pas d’intérêt à son nouveau mariage. Même si elle perd son foyer, elle n’aura aucun regret. Parce que généralement, dès qu’un homme prend une deuxième femme, il se met en conflit, souvent latent, parfois manifeste, avec la première (Uwar gida).

Les proverbes, les litanies et soliloques constituent une arme redoutable pour la femme nigérienne en général et celle rurale en particulier, lui permettant de dire ce qu’elle pense non pas à son mari seulement, mais à toute personne qui la provoque ou qu’elle veut provoquer. Cela lui confère l’image d’un griot en face de son auditoire. Car elle n’est pas toujours en mesure de tenir de façon directe ses propos.


Les Nigériens et le mois de Ramadan

Le mois de Ramadan est l’un des mois sacrés chez les musulmans.  C’est aussi un temps de grandes croyances et une période durant laquelle, tous les musulmans nigériens oublient leurs mauvaises habitudes. Ils deviennent alors des « vrais pratiquants ».

 Le ramadan a une très grande particularité dans la vie quotidienne des Nigériens. Il les pousse à un bref changement radical. Tous leurs comportements changent. On devient des « vrais » croyants. Les bars sont dépeuplés au profit des mosquées. Des personnes nées musulmanes mais qui ne connaissent pas la direction de la mosquée gonflent les rangs pendant les prières.  Des alcooliques notoires désertent les bars et cessent de boire pendant les jours du carême. Tu peux circulait dans toute la ville de Tahoua, le marché, dans toutes les fadas, tu ne sentiras aucune odeur de la fumée des cigarettes. Les restauratrices sont en chômage technique. Mêmes les maisons clauses ne fonctionnement pas normalement pendant le mois de carême. Beaucoup de professionnelles de sexe rangent leurs ténues sexy, les capotes pour s’adonner à l’adoration. Selon certains dires, mêmes les cambrioleurs s’abstiennent de voler pendant le Ramadan.

Les maris infidèles reviennent aux bons sentiments. Ils sont toujours à l’heure chez eux et disponibles pour leurs épouses. Il n’y a plus de missions fictives. Les copines et les maîtresses se patienteront. A l’annonce du croissant lunaire marquant ainsi le début du carême, les radios et télévisions nationales interrompent leurs programmes habituels. Elles ne diffusent désormais que des programmes à caractères religieux : pas de musique, de film, de séries télévisées, etc.  Les marabouts prennent d’assaut les médias pour des prêches de tout genre et autres chants religieux. En lieu et place des films pornographes, des chants du rap, des clips musicaux, les jeunes copient des vidéos islamiques, de récitation du coran. Le pantalon Jeans et la casquette sont délaissés au profit  de la djellaba et du bonnet. La cigarette à la main est remplacée par de longs chapelets. On adhère à des groupes religieux de discussion sur Whatsapp.

La notion de l’heure, du temps est rigoureusement  respectée pendant le Ramadan. Les  Nigériens s’accrochent intimement à la montre. Pour ceux qui n’en ont pas de montres, d’un réveil à la maison doivent nécessairement en chercher un par crainte de rater le suhur ou de prolonger involontairement le temps de rupture. Heureusement, la puissance de la technologie se fait sentir dans tous les domaines. Les cellulaires actuels disposent de toutes les facilités permettant au jeûneur d’avoir la maîtrise parfaite du temps. Des applications mobiles de gestion de temps de prière remplacent provisoirement les muézins. Avant cette période, beaucoup oublient quelle heure on est, ou sommes-nous à quel jour de la semaine. Le calcul des jours de ce mois n’échappe à personne.

Très malheureusement, à quelques heures de l’annonce de la fin du carême, tout le monde (presque) revient à ses vieilles habitudes. Ces groupes qui étaient obstinés contre la religion se régénèrent. Dès la veille de la fête, les bars, les maisons clauses, les salles de dansent reprennent vie. Pour certains, le mois de carême est fini, il faut aussi faire le rattrapage. Les commerçants véreux créent la pénurie pour doubler ou tripler le prix des marchandises.

 La religion, l’islam, se pratique à tout moment de l’année. Tâchons d’être de bons croyants et gagner ce Paradis que nous promet notre Créateur. L’hypocrisie, le show-off, ne nous conduisent à rien.